mercredi 18 avril 2012

2terlude

« Comme ces paysages qui ne se laissent contempler qu’après s’être rayé l’épiderme sur des ronces, esquinté les articulations sur de franches pentes aux cailloux instables, apprécier Yvon Jezequel demande de passer outre un premier abord un peu plus qu’abrupt.
Rebutant à la première rencontre par ses emballements, cette fougue difficilement canalisable qui effraye facilement, peu à peu se dévoile, je vous le garantis, qui nous ramène vers lui et que j’espère, vous découvrirez dans ces pages auxquelles on pourra reprocher des impasses en foison et du parti-pris en excès mais ni le manque d’engagement, ni le côté fabriqué des petits calculateurs.

[…]

Ici, je voudrais revenir sur un bien mauvais procès qui lui a été fait, d’autant plus vicieux qu’il n’est plus en mesure, lui, de se défendre.
Dans sa volonté de tisser des affinités mystérieuses mais décisives entre Amérique et Armorique – volonté qu’on peut discuter mais sans lui faire des procès en sorcellerie sur ses intentions sous jacentes – le reproche lui a plusieurs fois été fait de négliger l’apport africain dans la musique américaine pour la résumer faussement à l’affrontement entre natifs (ou indiens) et colons européens.
Injuste.
C’est vrai qu’il serait ridicule de parler musique américaine sans aborder sa dimension africaine, décisive. Mais, ceux qui lui font ce reproche ne l’ont surtout pas lu ou alors, à charge, traquant les éléments instruisant leur procès, omettant ce qui modifierait leur thèse. »

Extraits de la préface de M. LePaf, journaliste, au livre Armoricana d’Yvon Jezequiel

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« C’est vrai que c’est entre l’arrivant volontaire – le colon – et l’autochtone – l’envahi – que s’est jouée la confrontation qui m’intéresse ici car c’est elle qui me parait la plus porteuse de promesses de vie nouvelle pour nous autres extrêmes ouestains du continent. Dans cette confrontation, l’arrivant involontaire – l’Africain – tout important qu’ait pu être son rôle musical, n’aura qu’un rôle mineur dans cette pensée au travail.
Ceci ne veut évidemment pas dire que je minore leur rôle général qui est immense, il paraitrait impossible voire dément de ne pas le reconnaitre.

[…]

Ils ont fait de cette terre qu’ils n’ont pas choisie, un point d’ancrage pour reconquérir le reste du monde. Et dans cette fabuleuses Reconquista, s’entendent encore les échos de telle ou telle facette de la très vaste tradition musicale du continent saigné.

Je pense aux Jalis, ces troubadours, musiciens et chefs du protocole de l’empire Songhaï, à la fois prestigieux et bannis comme hors-castes. Conservateurs et scribes par leur corps, leurs danses et leurs chants, de la culture impériale.
Capacité d’écriture et de conservation par autre chose que l’inscription, ce qui n’aura d’ailleurs pas échappé aux contremaîtres, soucieux d’empêcher ces expressions par trop souvent séditieuses.

Mais aussi, les pulsations des peaux frappées et des clochettes que secouaient avec une fureur ingénieuse les Edos, dans ce qui deviendra l’empire du Bénin.
Les souffles héroïques des trompes d’ivoire des Ashanti, du royaume d’Akan – maintenant, peu ou prou, le Ghana.
Ou encore les pleurs criés sur fond de polyrythmie, marque de fabrique des Yorubas de l’actuel Nigéria et qui font aujourd’hui ce que la soul peut avoir de plus déchirant. »

Extraits d’Armoricana d’Yvon Jezequiel

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